Monsieur AZNAVOUR

Non-Officiel

Vos critiques sont les bienvenues sur le site. Un espace est ouvert pour cela. Le nouveau forum est en ligne sur MonsieurAznavour.com

Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Obtenez 1000 visiteurs rapidement !
Outils webmasters Compteur Chat Forum Sondage Découverte Référeur


M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum



  Pages: 1
Poster un nouveau message Répondre au message
Auteur Message
   Trier par date décroissante
Ayk
Posté le:
26/12/2008 16:41
Sujet du message:
Le mot est la chose la plus importante !
Répondre            
Email:
ayk.potukyan@free.fr
Site Internet:
http://monsieuraznavour.com
Charles Aznavour : "Le mot est devenu la chose la plus importante de ma vie"

Nous vous proposons de suivre un entretien sur les mots, la chanson et la littérature avec Charles Aznavour. Celui dont nous fêterons les 85 ans en mai prochain est plus que jamais le chanteur français le plus connu au monde.

Il y a deux ans, le 1er Décembre 2006 Eric Donfu, président du festival francophone du mot et du son nouveau XYZ lui avait remis le « premier prix du mot révélé » pour sa chanson « Des mots » qui figure dans l’album « Je voyage » édité en 2003. L’occasion d’une discussion exceptionnelle avec l’artiste, intégralement reproduite, et pour la première fois, mise en ligne, à l’occasion notamment de la sortie de son dernier album « duos » et de la distinction de Charles Aznavour comme « Ambassadeur de la langue Française » par les autorités Canadiennes en novembre 2008. « Aznavour en liberté » c’est le titre de la tournée qu’il se prépare à faire au Canada puis aux Etats-Unis au début de l’année 2009.

Il a joué dans plus de soixante films, composé plus de 1000 chansons, chante dans cinq langues et a déjà vendu plus de 100 millions de disques à travers le monde : Charles Aznavour est aujourd’hui le chanteur français le plus connu à travers le monde. Depuis la mort de Frank Sinatra, et après plus de 60 ans de carrière, il est même considéré comme l’un des derniers monstres sacrés de la chanson. Le rencontrer est un privilège exceptionnel. Mais l’homme est si authentique et familier, plaisantant, curieux, écoutant, que la rencontre fut naturelle, détendue et chaleureuse. Elle reste, deux ans après, un souvenir merveilleux. Elle eut lieu à Paris, dans les locaux de sa maison d’édition, un vendredi de décembre, après le déjeuner.

Arrivé accompagné de son fidèle ami et partenaire Levon Sayan, Charles Aznavour était resté seul avec Eric Donfu, pour une discussion à bâtons rompus sur les mots, la langue française, la chanson, la littérature, l’Arménie, le Havre et la vie. Avec l’accord de Charles Aznavour, cet entretien a été enregistré, puis il a été relu par ses soins.

Après la sortie de son dernier album, de duos « internationaux » le 9 décembre dernier, et qui a été réalisé au cours des trois dernières années, Charles Aznavour apparaît bien aussi comme l’ambassadeur de la langue française dans le monde. En effet, ce double CD baptisé Duos comprend des chansons en tandem avec notamment Céline Dion, Placido Domingo, Sting, Elton John, Julio Iglesias - ou virtuellement avec Dean Martin, Édith Piaf et Frank Sinatra. Mais le premier disque est uniquement consacré aux versions françaises, alors que le second est consacré aux versions en anglais, espagnol, allemand et italien, langues dans lesquelles chante aussi Aznavour. « Je suis né duettiste, a rappelé celui qui a débuté au sein du duo Roche-Aznavour (avec Pierre Roche), cela a été huit ans de ma vie, huit ans de bonheur. (...) Tous mes invités ont chacun choisi la chanson qu’ils chantent, les orchestrations se sont faites sans mon concours et tous, sans exception, ont demandé à chanter en français - Sting et Elton John voulaient même ne chanter qu’en français ! » .

C’est aussi à ce titre que Charles Aznavour , déjà commandeur de la légion d’honneur, a reçu l’insigne d’Officier de l’Ordre du Canada , la plus haute distinction du pays en novembre dernier des mains de la gouverneure du Canada. Michaëlle Jean a notamment salué l’oeuvre de Charles avec ces mots : « Cette légende de la scène a su éblouir les publics du monde entier, mais demeure avant tout l’un des plus grands ambassadeurs de la langue française. » Mais revenons au vendredi 1er décembre 2006, et écoutons Charles Aznavour parler des mots comme il l’a rarement fait..


Le Festival du mot nouveau

Eric Donfu : XYZ, le festival du mot et du son nouveau qui vous remet son prix aujourd’hui, est le premier et le seul festival francophone du mot et du son nouveau. Ce n’est pas un festival de poésie ou de littérature, pas même un festival dédié aux mots qui existent, c’est le festival de la création de mots, néologismes, mais aussi emprunts, formants... c’est pour cela qu’il est aussi ouvert aux sons, car les mots, au départ, sont des sons, le mot venant lui-même du latin motum qui veut dire son. C’est sa cinquième édition. Il se tient chaque année la troisième semaine de novembre, en même temps que le Beaujolais nouveau, en musique et dans l’esprit de René Fallet, à la fois à Paris et bientôt dans d’autres lieux en France, et tout converge au Havre, ou il a été créé et ou il délibère chaque année, toujours en hommage à Raymond Queneau, dont c’est la ville de naissance. Chaque millésime a son mot nouveau élu. Depuis 2002, ce sont « se faire électroniquer », « Humanicide », « Chaudard », « Désoiffer » et le dernier « Ordinosaure ». Leurs définitions sont dans ce dossier mais ils parlent d’eux-mêmes.... Depuis cette année, nous décernons aussi un prix à un artiste ou un écrivain qui a fait la promotion du mot nouveau. Et c’est vous qui avez reçu le premier ce prix, pour votre chanson « Des mots » mais aussi pour toute votre œuvre.

ED : Et est-ce que vous avez inventé des mots, Monsieur Aznavour ?

Charles Aznavour : Oui ! Même récemment, j’en ai inventé deux. Je n’ai pas mon bouquin là, mais je me souviens que j’ai gardé le second car le premier était plus difficile à comprendre. C’est un mot qui découle d’un autre mot. Je suis capable d’écrire « votre vestimentation » ce n’est pas un mot qui existe et pourtant le mot alimentation existe ! Alors je trouve anormal que l’on puisse dire aliment, alimentaire et alimentation, et pas vestimentation ! Si dans une chanson une fois j’ai besoin d’une rime avec l’idée de se vêtir, j’utiliserai le mot vestimentation, et personne ne se rendra compte que le mot n’existe pas. C’est ce que j’ai fait dans la chanson... elle est d’ailleurs dans mon prochain disque, c’est pour cela que je ne m’en souviens pas ! Oui, il faut inventer des mots, à condition de se dire, « ce mot va être compris par tout le monde ». et celui que je vais inventer, il sera compris et on ne saura pas qu’il n’existe pas. Lorsque j’ai écrit « Comme ils disent » j’ai parlé de la rue Sarasate. Pour avoir la rue Sarasate j’ai fais toutes les rues de Paris, pour savoir s’il y avait une rue en « ate », il n’y en avait qu’une. Et je l’ai employée. Mais si ne n’avais pas trouvé, j’avais décidé que je mettrais la rue Socrate, sachant pertinemment que personne ne sait s’il y a ou par une rue Socrate dans Paris. Il y a une rue Avé Maria, vous le savez ?

ED : Non, je ne savais pas

CA : Et bien oui, il y a une rue Avé Maria, il y a des rues curieuses, comme ça...

ED : C’est vrai, vous êtes peut-être un de ceux qui ont le mieux utilisé la sonorité des mots français, quand on se souvient de « La Bohème »...

CA : Ce n’est pas de moi le texte. C’est un des plus beaux textes de mes chansons, c’est Jacques Plante qui l’a écrit, et il a écrit un autre texte splendide qui est « les aventuriers ». Moi je n’ai écrit que la musique. Mais quand il m’a amené les quatre premiers mots, car il est arrivé avec les quatre premiers vers de La Bohème, j’ai dit ça je le fais. C’était « Je vous parle d’un temps Que les moins de vingt ans Ne peuvent pas connaître » Je lui ai dit c’est bon, continue ! J’ai toujours accepté les bons auteurs, c’est la raison pour laquelle j’ai très peu de textes dans mes chansons qui ont été écrits par d’autres parce que je ne suis jamais satisfait de la manière de les écrire... les idées sont souvent bonnes, l’écriture, souvent, pas bonne. Mais quand Bruel chante une chanson et dit « Jtaim » je trouve ça horrible, quand « je t’aime » est tellement joli... Pourquoi inventer un mot comme celui-là ? Il ne faut pas hésiter à ajouter une note. Les notes ont moins de valeur que les mots à mon avis... Surtout les notes d’électricité (rires)


Le Havre

ED : Et vous connaissez Le Havre ?

CA : Oui, j’ai connu Le Havre pendant la guerre, et après la guerre aussi. La première fois que l’on a présenté un film à moi au Havre, c’était « La tête contre les murs ». On passait en attraction dans les cinémas, on faisait les boites de nuit et comme les artistes n’avaient pas le droit d’y aller, et que pour nous c’était l’aventure, on prenait le train, on descendait là ou le train ralentissait parce que il y avait un pont qui avait été détruit, etc., etc., et puis de là, on rejoignait la ville et on chantait dans les cinémas. Parfois on restait un peu plus longtemps, parce que l’artiste d’après n’était pas arrivé...

ED : Et donc vous avez connu le Havre avant la destruction...

CA : Oui, oui,...

ED : Et vous êtes retourné il n’y a pas très longtemps aux docks océanes, non ?

CA : 0ui, plusieurs fois, et il y a quatre a cinq ans je crois...


Les textes sur les ports et les bateaux

ED : Et la chanson « Emmenez-moi » elle parle de quel port ?

CA : Ah, et bien ça, je l’ai écrite entre Hong-Kong et... comment on appelle la ville du jeu ?

ED : Macau ?

CA : Macau, oui, sur le bateau qui allait de Hong-Kong à Macau. C’est là que j’ai eu l’idée, je ne l’ai pas écrite là, j’ai trouvé les quatre phrases importantes là, et après j’ai écrit la chanson...

ED : A quelle époque ?

CA : Il y a trente-cinq ans. Je le sais parce que ma fille n’était pas née, cela fait donc trente cinq ans.

ED : Je pense que c’est l’une des rares chansons majeures qui traduise si bien l’esprit des Ports, l’âme portuaire...

CA : Oui, mais je n’ai pas écrit autre chose ? Si j’ai écrit des musiques sur des textes. « Les bateaux sont partis » qui est un texte de Bernard DIMEY... et si « ALLEZ VAI MARSEILLE », bien sûr...

ED : Oui, la chanson sur Marseille. Mais « Emmenez-moi » sur le plan musical, c’est quelque chose d’extraordinaire, il y a le mouvement des vagues, il y a une puissance...


CA : C’est une valse, et c’est une valse un peu péruvienne, parce que les valses européennes, ou ce sont des java, ou se sont des valses viennoises, les autres sont des valses bâtardes, mais ce que j’aime ce sont les valses mexicaines ou vénézuéliennes, qui ont un rythme en plus, un fond rythmique qui est beaucoup plus intéressant...


Le style musical

ED : Mais est-ce qu’il n’y a que cela ? Dans un genre différent, la chanson « Les loups sont rentrés dans Paris »...

CA : Oui, qui chantait ça déjà ?

ED : Reggiani, non ?

CA : Oui, c’est Reggiani...

ED : J’avais rencontré celui qui l’avait écrite, et presque tout tenait dans cette astuce du verbe musical « Les Lou ou », et c’est pareil avec votre chanson « Emmenez-moi » quand vous remontez à toute vitesse, avec les mots qui s’entrechoquent... Ca n’a pas d’age, c’est d’une créativité éternelle...

CA : Il y a deux sortes de chansons, il y a la chanson immédiate, qui est faite pour consommer immédiatement, et puis il y a la chanson qui est faite pour durer. Il y a la chanson qui est faite pour la tête, il y a la chanson qui est faite pour le cœur, et la chanson qui est faite pour les jambes... Celles qui tiennent le plus longtemps, ce sont celles qui sont faites pour le cœur et la tête, et peut-être même le cœur en premier, la tête en second, et les jambes, parce que la jeunesse a besoin de s’exprimer, de s’extérioriser, et ce sont des chansons très utiles finalement. Je ne suis contre aucun style de chanson, je suis contre les mauvaises chansons. Mais même dans les chansons très populaires, ou le texte est un peu puéril et même un peu primaire, je trouve qu’elles sont agréables.


Les mots

ED : C’est vrai que vous, vous êtes auteur, compositeur, interprète. Et là, notamment, en ce qui concerne cette chanson « Des mots » qui nous a beaucoup touché, dans cet album « Je voyage » il y a un choc sur les mots, avec un orchestre symphonique... alors dites-nous, pourquoi cette chanson sur les mots ?

CA : D’abord il y a un processus qui est certain. Moi je suis un primaire, un primaire pur. Certificat d’études sans mention à l’âge de dix ans et demi et adieu l’école. Et ensuite, quand on a ce cheminement là, ou on veut aller plus loin, et si on n’en a pas les moyens, il faut trouver les moyens de le faire, ou on a envie de rester ce que l’on est, pourquoi pas, on est ouvrier spécialisé quelque part ou simplement balayeur, et puis votre vie vous convient. Moi la mienne ne me convenait pas, j’ai donc appris beaucoup de choses. Et le mot est devenu la chose la plus importante de ma vie. Mais pas seulement le mot en français, le mot en espagnol, le mot en italien, le mot en anglais... le mot en russe, en arménien bien sûr. L’Allemand j’ai eu beaucoup de difficultés, c’est une belle langue, j’aime toutes ces langues moi... Il y a au moins deux langues que j’aurais aimé connaître, c’est l’Arabe et le Chinois. Le Chinois j’ai essayé, je n’ai pas réussi. L’Arabe, peut-être que si je commençais, je pourrais réussir un petit peu. Mais, voyez, je n’ai jamais été tenté par le Grec ancien ou nouveau, jamais, c’est curieux. Mais si je vais en Grèce, je peux me débrouiller dans une autre langue ! Ce sont les langues difficiles qui m’intéressent. Je suis intéressé par les mots, je suis intéressé par les phrases, je suis intéressé par les jeux de mots, les plus bêtes, comme les meilleurs, parce que pour faire un très bon jeu de mot ou une très bonne contrepèterie, il faut en faire une dizaine de mauvaises...

ED : Vous avez écrit pour Juliette Gréco, aussi ?

CA : Non, je n’ai pas écrit pour Juliette Gréco, j’avais écrit une chanson pour Piaf « je hais les dimanches » , qu’elle a refusé au départ, même si elle l’a enregistrée quand même après. Pour elle c’était un truc difficile. Et c’est en effet Juliette Gréco qui l’a interprétée la première. Au début j’ai écrit des chansons qui étaient difficiles pour les gens. J’arrivais avec un style nouveau, je jouais avec les mots, je jouais avec les sons... Comme je trouvais que la langue anglaise était plus pratique pour écrire, j’essayais d’écrire le Français avec des mots très courts, ce que j’ai fait énormément, même si par la suite, j’ai changé. Mais c’est vrai que les mots, pour moi... vous trouverez toujours un dictionnaire là ou je me trouve, j’ai toutes sortes de dictionnaires... on emploie toutes sortes de mots, et on en oublie beaucoup... Alors, il y a le Robert, le Larousse, ... j’ai ça à coté de mon lit et depuis peu le Littré.

ED : Et Queneau, vous l’avez connu ?

CA : Non, je ne l’ai pas connu. Mais j’ai connu très peu de gens et je connais très peu de gens. Je suis un solitaire convivial. Quand je sors, je suis très ouvert, mais je sors très peu. Non, j’ai connu Cocteau, j’ai connu Achard, et aux états unis, j’ai connu, comment il s’appelle, celui qui a écrit Fahrenheit et les choses extra-terrestres... Bred Bradbury... J’ai connu ces gens là, j’ai connu Prévert, bien sûr, Salmon, des poètes surtout, j’ai toujours été très attiré par la poésie, sachant pertinemment que je ne serai jamais poète moi-même car c’est un autre état d’esprit que le mien. J’aime beaucoup la poésie, mais je n’ai pas l’état d’esprit d’un poète. Malheureusement, je ne les lis pas souvent dans mes textes, mais j’aime Saadi, j’aime le poète portugais Pessoa...

ED : Et chez les Français, Eluard, Char ?

CA : Plutôt les anciens. Ronsard, et Victor Hugo. J’adore Victor Hugo. J’ai une passion pour tout ce qui est Victor Hugo et quand on m’interroge et je dis Victor Hugo, on me regarde comme si Victor Hugo était une réponse commune, même au-dessous des autres, alors que pour moi, il est souvent au-dessus des autres ! Tout comme Balzac ! Disons que pour aborder des thèmes pour la chanson, les deux plus intéressants sont Victor Hugo et Balzac, parce que les thèmes sont des thèmes forts, comme chez les Molière, Corneille ou Racine. On ne s’en rend pas compte, mais il y a une versification qui est merveilleuse, et moi j’aime bien versifier très proprement. J’ai pas commencé comme ça, j’ai écrit « tu’t’laisses » « J’me voyais déjà », mais très vite, je me suis rendu compte qu’il fallait utiliser chaque syllabe, même dans les chansons rapides, il y a toujours des liaisons. J’appelle cela un texte propre. Les gens comme Béart écrivent des textes propres, c’est ce que j’aime. Je me sens proche des gens qui écrive correctement le Français. Par exemple je me mets souvent en colère à la télévision. Quand j’entends dire c’est « une boté ».. J’ai envie de leur dire elle est boté comment ? des jambes ? Le mot beauté a sa prononciation !

C’est comme la lettre X, on ne l’entend plus ! Ecoutez les gens dire extraordinaire... la plupart disent esstraordinaire... Maintenant ont dit des CatCat et plus des quatre-quatre, le chiffre quatre n’est plus prononcé. On ne dit plus le quatre septembre, mais le quat septembre... Ca m’énerve ! Je me rends compte tout d’un coup que les étrangers, et les fils d’étrangers, sont souvent plus attachés à la langue que les Français eux-mêmes, car j’ai des amis comme moi qui sont d’origine italienne ou d’origine espagnole, et bien, ils sont comme moi, attachés à la langue française.


Son prochain disque, la relève

ED : Dites nous ou vous en êtes, vous êtes en train d’enregistrer ?

CA : Ah, j’ai fini. Ca y est j’ai fini. J’ai écrit une chanson très écologique, car je suis très inquiet de l’avenir de la planète, cette chanson s’appelle « la terre meurt » et j’ai écrit aussi une chanson sur les banlieues, car je suis très proche de cette jeune immigration....

ED : D’ailleurs vous éditez Grand Corps Malade, qui est une révélation du Slam...

CA : Grand Corps Malade, c’est bien ! C’est mon gendre et ma fille qui s’en occupent. Il écrit très bien. Mais ici on a que des gens comme ça, Lama, Serge Lama, qui est un des très bons auteurs de notre époque, avec un français impeccable, on a Linda Lemay, qui, dans la francophonie, est une artiste très très sérieuse, et une toute jeune femme qui s’appelle Agnès Bhil, qui est vraiment formidable, il faut que vous l’écoutiez, c’est l’arrière arrière petite fille de Vilette... et quatrième génération d’adultes de la Butte (Montmartre)... vraiment, c’est assez extraordinaire, on a aussi SanSeverino, qui est encore une chose différente..

ED : Oui, il y a des jeunes qui reprennent le flambeau..

CA : Oui, il y en a, il y en a quelques-uns aujourd’hui. Il y en a certains que je trouve légers point de vue mots, mais il y en a d’autres qui sont plus forts.

ED : Ecoutez, magnifique, merci à vous

CA : Merci aussi


L’Arménie et le jardin extraordinaire

ED : Voilà le cadeau que nous vous avons apporté, il s’agit d’une pièce ancienne d’Arménie, de l’époque cistercienne, c’est-à-dire vers 1260, à l’époque ou l’Arménie luttait contre les croisades. Elle représente les rois d’Arménie de cette époque, un couple, Athum et Zabel,

CA : Zabel ?

ED : Oui, avec un livre sur l’Arménie au Moyen-âge, c’est un numismate parisien, Claude Burgan, qui vous l’offre, il est d’ailleurs votre voisin...

CA : Merci, car je ne connais pas bien l’histoire de l’Arménie

ED : ... votre voisin à Mossan, dans le sud

CA : A Mossan ? Oui, moi je suis à côté, à Mouriès.

ED : Et vous y êtes toujours ?

CA : Ah oui oui, toujours, pensez donc ! J’ai acheté un mas qui était tout petit. J’ai agrandi un terrain, j’ai acheté 4000 mètres, puis 2000 mètres en ligne et 400 mètres et 700 mètres, j’ai réussi à faire 22 000 mètres. Là-dessus il n’y avait rien, j’ai amené des arbres... J’en ai amené un, il a 900 ans, j’en ai amené de 150 ans, je viens de planter des Oliviers, qui ont 100, 125 ans... Il y a une faune extraordinaire, et je continue car je suis un... un amoureux de la nature. Je suis écologiste raisonnable, parce que les Greenpeace, etc.... ils me cassent parfois les pieds, j’avoue, mais je suis raisonnable, et je veux finir ma vie en laissant un parc extraordinaire avec des choses venues d’un peu partout, d’Espagne, d’Italie, du Portugal, du Maroc...

ED : Et il y a un potager, aussi ?

CA : Alors, le potager, j’en ai un ici, et je viens d’en avoir un là-bas. J’ai une grande piscine qui était couverte, j’ai fait enlever le dessus et j’en ai fait une serre... Alors là on va avoir un de ces potagers...

ED : Je sors bientôt un livre sur la Carotte... La métamorphose de la Carotte,

CA : La Carotte ?

ED : Oui, sous un traitement autant botanique que philosophique... je vous en enverrai un exemplaire...

CA : Ah oui, parce que ma femme adore les carottes ! Moi, je ne suis pas très...

ED : Ah mais la Carotte c’est magique,

CA : Moi la carotide ça s’arrange ! (rires)


Un mot sur le mot

ED : Ecoutez, merci, ce fut un grand honneur, est-ce que vous pouvez nous écrire un mot sur le mot ?, une phrase, comme ça ?

CA : Oui

Charles Aznavour écrit cette phrase :

« Que dire du mot ? Sinon qu’il parle de lui-même. En un mot, le mot que j’en dirais c’est que le mot est le mot...et beaucoup plus encore. » Charles Aznavour

CA : La prochaine fois vous me le demanderez un jour avant, je pourrai vous écrire autre chose...

ED : Mais il n’y a pas eu d’hésitation..

CA : Non, moi j’écris soit comme cela, d’un trait, ou alors c’est pensé, réfléchi, et corrigé mille fois. Car je suis le roi de la correction.

ED : Oui ?

CA : ...Sauf mes enfants que je n’ai jamais corrigés, mais mes chansons je les ai corrigées... bah, il fallait corriger quelque chose

ED : Dans le cadre du festival, nous serons tous très heureux de vous inviter au Havre comme à Paris. Je sais que la mairie du Havre sera aussi heureuse de vous recevoir et de vous remettre la médaille de la ville, c’est ce que m’a dit son maire...

CA : Ah, vrai - ment ?


Voilà, une heure et quart d’entretien viennent de passer comme cinq minutes. Nous finissons la discussion et Charles Aznavour me fait la présentation de ses bureaux. En conclusion, que dire de l’homme ? Dans son livre 50 Ans de chanson française le journaliste Lucien Rioux fait de lui un portrait troublant : « Sur scène ou sur disque, il semble incarner une sorte de malheur diffus qui s’exprime aussi bien dans l’intonation que dans le comportement. De là l’émotion qu’il fait naître. Ce n’est pas la pitié. Plutôt une compréhension exacerbée. On voudrait l’aider, le soutenir... Presque le protéger », commentait -il. Sans doute y a-t-il de cela dans son univers, et même dans son énigme, telle qu’il a su la mettre aussi si bien à l’écran, par exemple dans le film de Truffaut, « Tirez sur le pianiste ». Après l’avoir rencontré, je saluerai bien sûr un très rare talent, mais servi aussi par un professionnel, bosseur et méticuleux. Si besoin, la précision de ses références, des concepts et des chiffres qu’il cite dans cet entretien en est la preuve.

Merci, et un grand Bravo l’Artiste !

ED

Entretien entre Charles Aznavour et Eric Donfu, enregistré à Paris, aux éditions Raoul Breton, De 14 heures à 15 h 15 le Vendredi 1er décembre 2006 Photos : Barbara Rix Assistante : Claire Garriaux
 

PatrickAlex
Posté le:
29/11/2010 14:00
Sujet du message:
Superbe texte, merci
Répondre            
Email:
patrickalexndre14@gmail.com
 
J'adore cette discussion entre Eric Donfu et Charles Aznavour sur les mots !
Il faudrait la diffuser plus largement.
PA
 

Ayk
Posté le:
1/12/2010 11:15
Sujet du message:
RE: Superbe texte, merci
Répondre            
Email:
ayk.potukyan@free.fr
Site Internet:
http://monsieuraznavour.com

D'accord. Je vais mettre ce texte sur la page Facebook...

D'ailleurs, toute l'actualité est traitée à présent uniquement sur la page FB de Monsieur Aznavour.

A bientôt,

Ayk.
 

Poster un nouveau message Répondre au message
  Pages: 1

M'inscrire M'inscrire Me connecter Me connecter Mot de passe oublié Mot de passe oublié Retour au forum Retour au forum